Au Canada, les communautés francophones en situation minoritaire (CFSM) vivent un déclin démographique existentiel qui met en péril leur vitalité linguistique et culturelle. Afin de palier à ces défis, le gouvernement fédéral, certains gouvernements provinciaux et divers organismes francophones misent sur l’immigration francophone. C’est ainsi qu’au cours des dernières années, nous avons vu la création des communautés francophones accueillantes désignées, de programmes permettant le recrutement de professionnels francophones à l’étranger, ainsi que de modifications au système de points d’IRCC visant à faciliter l’accès de francophones à la résidence permanente. Toutefois, on reconnait dans ces initiatives un fort discours utilitaire, qui néglige l’agentivité des immigrants francophones en ce qui a trait d’une part à leur liberté de mouvement au Canada, et d’autre part, à leur choix de participer à, et de développer un sentiment d’appartenance envers la communauté francophone d’accueil. À l’intersection de ces discours, nous trouvons plusieurs organismes francophones qui doivent à la fois mettre en œuvre les politiques et les programmes gouvernementaux et servir les immigrants francophones tout en reconnaissant leur agentivité. Cette communication, fondée sur des entretiens semi-dirigés et des groupes de discussion auprès d'informateurs clés d’organismes francophones (communautaires, publics et privés) de la région du Grand Toronto, s’interroge sur la manière dont s’articule, chez ces organismes, le discours sur l’agentivité des immigrants francophones quant à leur mobilité et de leur appartenance communautaire. Elle examine les perceptions et les attentes de ces organismes, et met en lumière le rôle des contraintes structurelles (politiques, structures et modalités de financement, redevabilité envers les bailleurs de fonds et les conseils d’administration, mandats institutionnels, etc.) dans la production de ce discours et les tensions discursives que cela occasionne. Enfin, nous proposerons des recommandations visant à encourager la collaboration inter-organisationnelle pour l’adoption d’une approche de l’immigration francophone valorisant davantage l’agentivité et des aspirations des nouveaux arrivants.